L'hégémonie du capitalisme à l'échelle planétaire, les moyens dont il se dote pour se maintenir, et le manque, pour les populations, de perspectives globales à lui opposer, imposent au mouvement anarchiste de nouveaux enjeux, s'il veut se sortir de sa confidentialité pour peser sur les événements. Nous, militants et militantes de la CGA, souhaitons créer un espace propice à réunir les conditions afin d'y faire face. Nous nous organisons dès aujourd'hui pour que nos débats futurs puissent se nourrir des besoins liés à nos activités militantes, pour ne pas limiter nos luttes sur le plan local, et pour peser par nos actions. Par ailleurs, nous voulons redéfinir comment nous pouvons et voulons intervenir en tant qu'anarchistes dans la société et quelles formes d'organisations sont nécessaires pour y parvenir. Ainsi, ce qui suit évoluera en fonction des avancées de nos discussions et de nos réflexions, à partir de nos modes de décisions définis dans nos fonctionnements.

La Coordination des Groupes Anarchistes

Pour nous, militantes et militants de la CGA, la question de l'organisation ne se pose pas en terme de choix tant elle est une nécessité impérieuse socialement et politiquement.

L'addition des révoltes individuelles, même si elle est une excellente chose comparée à l`acceptation silencieuse (sans broncher) des conditions qui nous sont imposées, n'est pas suffisante quand il s'agit de mener à bien la lutte pour renverser l'ordre social établi.

L'organisation permet de donner du sens à la lutte collective et à l'engagement de chaque individu et ajoute l'efficacité du nombre au contraire de l'isolement individuel qui n'a pas grande prise sur les événements sociaux et politiques.

L'organisation permet par ailleurs d'envisager le type de société dans laquelle nous voulons vivre à l'avenir et de nous en rapprocher le plus possible dès à présent.

Il s'agit donc de nous organiser :

• afin de permettre l'autogestion de nos actes et de nos luttes,

• afin de favoriser les prises de décision les plus collectives et égalitaires,

• afin d'élaborer en commun, collectivement, les différentes étapes de la lutte pour l'avènement d'une société égalitaire et libertaire.

Le but de la CGA sera de peser réellement sur la scène sociale et au sein des luttes sans pour autant accepter de compromis idéologiques avec des partis ou officines prônant le recours à l'étatisme. Cela ne peut signifier que nous ne mènerons aucune action aux côtés de telles organisations mais plus simplement que, dans ce cas précis de luttes « collectives », notre organisation défendra ses positionnements libertaires !

La CGA ne se veut pas nihiliste mais elle se veut révolutionnaire, dans le sens où chacune des revendications qu'elle est susceptible de porter ouvre systématiquement sur une autre revendication (future) devant nous conduire plus loin (toujours plus loin) sur la voie de notre affranchissement.

Chacune des luttes engagées pour en finir avec la société d'exploitation et d'aliénation est pour nous une étape favorisant la prise de conscience des individus et des masses dans la capacité qui est la nôtre à faire reculer les systèmes, à les vaincre et à gérer la société sans aucun intermédiaire...

La CGA s'inscrit donc dans les actions et les luttes qui apportent des éléments de rupture avec le fonctionnement sociétaire établi.

Ce type d'actions est, dans son contenu même, porteur d'avancées révolutionnaires car il n'est pas susceptible d'être récupéré par les systèmes en place.

La CGA ne se fixe pas une seule des voies idéologiques de l'anarchisme, à l'exclusion de toutes les autres.

Nous sommes pour une conscience aiguë de la capacité des individus à se gérer directement et sans avoir recours à des guides « politiques » ou « religieux ».

En ce sens nous ne rejetons aucunement la dimension individualiste de l'anarchisme mais nous pensons que l'organisation nécessite une dimension collective.

La CGA est favorable à l'organisation des travailleurs et des travailleuses sur la base de l'action directe et de la gestion directe de la production, des services et de leur répartition dans la société future.

Ceci implique que les luttes ouvrières ne s'inscrivent pas dans une dérive politicienne ni sur les voies de la compromission.

La CGA se bat pour ériger dans le futur une société anarchiste. Celle-ci assurera :

• l'égalité entre tous les individus qui la composent d'un quintuple point de vue : économique, social, culturel, ethnique et de sexe,

• la liberté pour chacune et chacun de vivre la vie qui lui va le mieux sans pour autant empiéter sur la liberté des autres...

Egalité économique et sociale et Liberté individuelle peuvent garantir une société ou l'humanisme radical et anarchiste aura remplacé la barbarie étatiste et capitaliste.

La vie en société pourra enfin remplacer la survie encadrée et policée !

La CGA s'organise et lutte pour ce type de société.

Nos principes

L'adhésion à la Coordination des Groupes Anarchistes suppose l'acceptation sans réserves de ce qui suit. Ces « principes » ne seront révisables qu'à l'unanimité.

Ce qui fonde notre engagement anarchiste et révolutionnaire, c'est la dénonciation constante des inégalités sociétaires, des injustices de tous ordres, de l'exploitation capitaliste et de l'aliénation étatique.

Ces inégalités et injustices ne sont pas le fruit du hasard et encore moins les « conséquences naturelles » de la vie en société. Elles sont en réalité le fruit de volontés politiques clairement définies et sont mises en place pour le plus grand profit d'un petit nombre de privilégiés et de privilégiées, au détriment de l'écrasante majorité des populations du globe.

A partir de ce simple constat et de l'évidente réalité que les politiques d'exploitation et d'aliénation sont menées malgré les conséquences terribles dans lesquelles elles placent des centaines de millions d'individus - misère, déclassement, famine, racisme, aliénation, déficit culturel, etc. - nous nous sentons fondés à nous organiser et à organiser la lutte contre les conséquences de ces politiques et contre ceux qui les mènent, à savoir les Etats, les gouvernements, le patronat et les institutions d'aliénation et de coercition : Armées, Polices, Justice, Religions, etc.

La CGA ne se propose pas de participer au Pouvoir. Elle lutte pour l'abolition de toutes les formes de pouvoir et d'autorité. Antiétatique, elle ne tient pas à développer, ni en son sein ni dans la société future, des relations de dominant-e-s / dominé-e-s. Seules des relations égalitaires sont susceptibles d'engendrer une organisation harmonieuse et égalitaire de nos vies.

La CGA rejette, ce faisant, le recours à l'électoralisme qui favorise la distinction politicienne dominant-e/dominé-e, qui offre à une catégorie de « citoyens » et de « citoyennes » la possibilité de décider pour les autres et qui pérennise la domination et l'aliénation de l'Etat sur l'ensemble des individus. Ce rejet concerne toutes les consultations bourgeoises : municipales, cantonales, régionales, nationales et européennes.

La CGA se revendique de la lutte des classes et favorise autant que faire se peut les luttes sociales, les luttes à caractère syndical et les luttes de citoyens et de citoyennes qui s'auto organisent dans le but de faire reculer l'exploitation et la domination !

Nous favorisons l'action directe des individus et des masses afin de réaliser, dès à présent leur nécessaire auto-organisation, alternative réelle à la politique politicienne et à la délégation de pouvoir.

La CGA prône un mode organisationnel, le fédéralisme libertaire, qui a pour objet d'assurer les rapports des individus entre eux, de l'individu avec le groupe et des groupes entre eux. Il a pour base l'autonomie des individus et des groupes et repose pour l'essentiel sur la Solidarité et l'Entraide.

La CGA a l'ambition d'aboutir à une société basée sur le communisme libertaire d'où les aspects de l'exploitation et de l'aliénation auront disparu.

Fonctionnements de la CGA

Les Réunions

Les Congrès :

Les congrès rassemblent les mandatés des groupes et des liaisons de la CGA. Tout adhérent de la CGA peut y participer. La fréquence des congrès est annuelle.

Les prérogatives des congrès sont :

• La mise en place de stratégies et de tactiques politiques.

• Le bilan des campagnes engagées durant l'année écoulée, que ce soit sur le plan politique, idéologique ou tactique.

• La décision, la mise en place et le suivi des campagnes politique de la CGA.

• La mise en place et le réglage des structures de la CGA.

• La décision concernant l'adhésion d'un groupe ou d'une liaison.

• La définition des mandats et la nomination des mandatés.

L'ordre du jour est établi par le secrétaire, en tenant compte des demandes que les groupes lui formuleront et des points restés non traités.

Les réunions de coordinations

Les réunions de coordination rassemblent les mandatés des groupes et des liaisons de la CGA. Tout adhérent de la CGA peut y participer. La fréquence des réunions est bimestrielle.

Les prérogatives de ces réunions sont :

• La décision, la mise en place et le suivi des campagnes politique de la CGA.

• Dans un premier temps, une place est réservée systématiquement pour la mise en place de la CGA : implantation, fonctionnement,...

• Etablir le contenu du journal « Info et Analyses Libertaires »

• Contrôle des mandats

• La décision concernant l'adhésion d'un groupe ou d'une liaison.

L'ordre du jour est établi par le secrétaire, en tenant compte des demandes que les groupes lui formuleront et des points restés non traités.

Les réunions de commissions

Les commissions rassemblent des individus membres des groupes et des liaisons de la CGA. La fréquence des réunions est indéterminée. Elle est à fixer par les membres de la commission.

Les prérogatives de ces réunions sont :

• La mise en place de stratégies et de tactiques sur un sujet bien déterminé

• La production de réflexions, d'analyses

• La production de matériel militant

• L'éclaircissement des enjeux sur le sujet traités dans un souci de les soumettre au reste de la structure pour une appropriation collective du débat et éventuellement une prise de décision.

L'ordre du jour est établi par les membres de la commission.

Prise de décision

Les décisions se font à un vote majoritaire à 3/4 des voix potentielles arrondis au supérieur. Le processus inclus la possibilité d'un vote indicatif.

Décompte des voix.

Un groupe compte pour 2 voix jusqu'à cinq adhérents, et obtient une voix supplémentaire par tranche de cinq adhérents supplémentaires. Une liaison compte pour une voix.

Un groupe peut répartir ses voix entre les différentes propositions. La façon de les répartir est laissée à la charge des groupes.

Les Mandats

Mandats de fonctionnement

Les mandats de fonctionnement constituent les moyens humains dont se dote la structure pour fonctionner. Dans cette perspective, on utilise le fonctionnement de démocratie directe que constitue le mandatement. Ces mandats sont permanents dans le sens où leur existence n'a pas de fin prédéterminée.

Les mandats sont régis par les principes suivants : rotation, précision, contrôle et possibilité de révocation.

Le contrôle s'effectue grâce aux comptes-rendus du ou des mandatés et lors des réunions de coordinations. La révocation éventuelle est une décision traitée comme les autres. Le mandatement peut être donné à la charge d'un individu, de plusieurs individus, ou d'un groupe.

Définition des mandats

Pour l'ensemble des mandatés

• Réunir par écrit la définition du mandat ainsi que ses modifications et précisions.

• Faire un rapport écrit régulier donnant l'état du mandat.

• Faire un bilan au moment de rendre le mandat présentant le mandat donné associé à la tâche effectuée.

• Archiver les productions relatives à leur mandat.

Mandat de Secrétariat

Ce mandat sert de lien entre les différents groupes de la coordination

• Envoie à l'ensemble des groupes les comptes-rendus de réunion.

• Faire la synthèse des demandes d'ordre du jour des groupes en tenant compte des points en suspens.

• Edition et diffusion des circulaires mensuelles et d'un bulletin intérieur bimestriel .

• Archivage des comptes-rendus et circulaires .

Mandat de Secrétariat Extérieur

• Contacter la presse pour les diverses manifestations de la CGA et répondre à ses sollicitations.

• Entretenir des relations avec les autres organisations (qu'elles soient en France ou ailleurs)

• Entretenir des relations avec les organisations anarchistes internationales

• Archiver le matériel de propagande et les communiqués émanant de la CGA

Mandat Trésorerie

• Récolter les cotisations des adhérent/e/s aux travers des mandaté/e/s à la trésorerie des groupes et rappeler en cas de retard.

• Tenir au courrant les adhérents par une publication de l'état des cotisations.

• Tenir au courrant les adhérents de l'état de la trésorerie de la coordination.

• Présenter un bilan analytique de la trésorerie

Mandat à la production de « Infos et Analyses Libertaires »

• Effectuer la production, la diffusion et la trésorerie du journal « Infos et Analyses Libertaires ».

• Communiquer une épreuve du journal aux groupes juste avant la parution de chaque numéro.

• Gérer la création et la mise à jour du site Internet de la CGA.

Moyens de communications entre les groupes

La Circulaire :

Elle est éditée par le secrétariat. Ses prérogatives sont:

• Transmission d'informations envoyées par les groupes

• Synthèse de réunions de coordination

• Ordre du jour de la réunion de coordination suivante

Leurs périodicité est mensuelle. Elles peuvent être sous format papier et électronique

Le Bulletin Intérieur :

Il est édité par le secrétariat. Ses prérogatives sont 

• Comptes-rendus des mandatés

• Comptes-rendus de l'activité des groupes

• Textes d'un groupe à l'attention des autres

Sa périodicité est bimestrielle.

Modalités d'adhésion à la CGA

1. L'adhésion à la CGA

L'acceptation formelle de ce qui est décrit dans le document « La CGA : Coordination des Groupes Anarchistes » et le paiement régulier des cotisations sont constitutifs de l'adhésion à la CGA.

2. Les groupes, les liaisons

On adhère à la CGA au travers d'un groupe ou d'une liaison. Une liaison est constituée par un adhérent ou une adhérente qui a vocation à monter un groupe. A partir de deux personnes la liaison devient un groupe.

Une liaison ou un groupe se constituent, à l'exclusion d'une tendance politique quelconque, à l'échelle d'un quartier, d'une ville, d'une agglomération ou d'un département.

3. Rupture d'adhésion

L'adhésion à la CGA prend fin en cas de démission ou de rupture du contrat défini au chapitre 1. Cette rupture est constatée et il en est pris acte à l'occasion d'une réunion bimestrielle ou d'un congrès de la CGA.

4. Formation

La CGA s `engage à fournir à ses adhérents et à ses adhérentes les moyens de se former. Dans le même esprit, elle s'engage à se donner les moyens de former ses adhérents et ses adhérentes.

Annexe

Le Communisme Libertaire

La lutte des classes à laquelle nous nous référons, loin d'être revendiquée, voire utilisée à des fins politiques, étatiques ou tout simplement partisane, ne peut s'envisager sous l'angle de l'instauration d'une quelconque dictature.

Il ne s'agit pas plus de remplacer par ce biais, un gouvernement par un autre, mais il s'agit pour nous de contribuer à la création d'un cadre militant et social en vue de l'abolition de TOUS les privilèges : exploitations, classes etc., en luttant pour l'avènement de la société sans classes, sans pouvoir, vers la société anarchiste...

Pour la grande majorité des individus, le mot « communisme » est totalement déprécié, discrédité, chargé d'odieuses réminiscences, il n'en demeure pas moins qu'il qualifie toujours au plus prés notre conception juridique des droits de l'individu dans la société.

Pour nous la société qui écrase l'individu, doit être combattue. Comme, au point de vue économique, chaque individu devra bénéficier autant que l'ensemble, des biens dont disposera la collectivité, les anarchistes considèrent le communisme libertaire comme le moyen et le principe les plus sûrs pour atteindre ce but.

C'est précisément parce que nous sommes anarchistes, que nous sommes communistes. Loin de s'opposer, les deux notions se complètent. L'organisation sociale future s'articulera tout naturellement autour de la propriété commune des moyens de production et l'utilisation commune des produits du travail collectif.

Le projet politique anarchiste se traduit par la fédération des unions libres des communes indépendantes et des associations de producteurs. Comme l'écrit E. Malatesta, «  Le vrai communisme n'est possible que dans l'anarchie. Le communisme est un idéal, il deviendra un régime, un mode de vie sociale dans lequel la production est organisée dans l'intérêt de tous, dans la manière d'utiliser au mieux le travail humain pour donner à tous le maximum de bien-être et liberté possible et dans lequel tous les rapports Sociaux sont conçus en vue de garantir à chacun le maximum de satis-faction de développement possible matériel, moral et intellectuel. Mais une société communiste n'est possible que dans la mesure ou elle surgit spontanément du libre accord et par la volonté variable déterminée par les circonstances extérieures et les désirs de chacun. »

C'est donc par la résolution communiste du problème économique - c'est à dire par la suppression simultanée de l'exploitation et de l'aliénation - que l'on rend possible la coïncidence parfaite des fins particulières de l'individu et des fins générales de la collectivité.

Il est possible d'affirmer que cette organisation communiste de l'économie n'est possible que dans l'Anarchie, de même qu'il est loisible de penser que l'avènement total de l'anarchie n'est possible que sur une base économique communiste.

Dans un régime autoritaire, régime d`économie dirigée en l'absence des libertés, une classe ou une caste dirigeante se reconstitue fatalement avec ses privilèges et avec l'oppression comme conséquence.

Il n'est donc pas juste ni pertinent de confondre l'émancipation du prolétariat avec l'avènement des régimes autoritaires. Quelle que soit leur origine ! Comme le souligne R. Rocker, « le rôle du socialisme consiste à faire disparaître le pouvoir dans la vie sociale et non à le conquérir, s'il ne veut pas s'anéantir »...

Pour autant, la transformation du régime de propriété n'est pas suffisante pour définir tout le concept anarchiste de Révolution. Cette transformation de l'infrastructure est une condition nécessaire, sine qua non, de la transformation éthique, morale, culturelle de ce qu'implique, pour un(e) anarchiste, l'idée de la Révolution totale, mais elle peut n'être pas suffisante.

Le marxisme a posé comme postulat, qu'à partir de la révolution économique tout devait s'enchaîner nécessairement. L'anarchisme, en revanche, prétend que c'est seulement par l'abolition de l'Etat, par la conquête de la liberté entière de l'individu, par la libre entente, l'association et la fédération totalement libres, que nous parviendrons au communisme libre, à la possession commune de tout l'héritage social et à la production et au partage, en commun, de toutes les richesses...

Il est aisé de constater que la référence au Communisme libertaire incluse dans nos principes, ne recouvre pas une forme exclusive de regroupement militant, un choix tendanciel excluant toute autre conception, toute autre approche libertaire de la lutte sociale organisée.

Cette référence se veut, en revanche, la définition la plus précise du type de société auquel nous aspirons et pour lequel nous luttons.

P.S. : les phrases citées dans le texte ne le sont qu'à titre d'exemples et n'impliquent pas pour la CGA une référence exclusive aux deux auteurs...

« ancora su communismo ed anarchia » in Humanita Nova - Milan, 5 septembre 1920